Mais avant que cette lettre fût parvenue à La Bourdonnais, un événement imprévu avait tranché le nœud plus que gordien que les partis ne pouvaient s’accorder à dénouer. Dans sa lettre adressée à Dupleix, le 11 octobre, La Bourdonnais s’exprimait ainsi : « Ce que nous avons de plus contraire, c’est la Mouçon ; je veux bien rester ici jusqu’au 20 et peut-être jusqu’au 25, si le ciel nous est favorable. »
Le lendemain, il écrivait : « Le vent du Nord a commencé à souffler, il y a donc nécessité absolue de quitter la place… J’écris aujourd’hui à chacun des capitaines leur donnant des ordres pour que, si la nouvelle lune et la mouçon les forcent à prendre la mer, ils puissent ensuite regagner la côte. »
Le lendemain 13 fut une journée délicieuse, une des plus belles de la saison. Cependant la nuit vit éclater un de ces ouragans qui apportent périodiquement la ruine et la dévastation sur la côte de Coromandel. Les vaisseaux français, à l’exception de trois, le Saint-Louis, le Lys et la Renommée, envoyés à Pondichéry avec une partie des dépouilles de Madras, se trouvaient en chargement dans la rade. Outre leurs équipages, ils avaient à bord près de cinq cents hommes de troupes, le contingent de Pondichéry que La Bourdonnais avait, on se le rappelle, fait embarquer pour s’assurer une autorité sans conteste à Madras. La tempête, ainsi que cela est ordinaire, n’annonça que peu son approche. Cependant, avant qu’elle eût atteint toute sa violence, les vaisseaux avalent levé l’ancre et cherché à gagner la pleine mer. Pendant toute la nuit, l’ouragan se déchaîna avec fureur. La Bourdonnais, au premier sifflement de la tempête, s’était occupé des préparatifs
lettre du 12 avec quelques articles que nous avons examinés attentivement. Plusieurs raisons nous ont empêchés d’y accéder. Le temps que vous limitez pour l’évacuation de la place n’est point suffisant pour faire le partage de l’artillerie, des agrès et des vivres, et les enlever. Tout ce que l’on peut faire est d’y travailler aussi promptement qu’il sera possible.
« Quant aux otages, billets, lettres de change, nous voulons bien nous engager avec vous de les recevoir sans que cette acceptation de notre part puisse passer pour un acquiescement aux articles qui les concernent La rade de Madras ne peut être libre pour les Anglais, pendant la durée du partage. L’escadre anglaise n’a qu’à y venir avec cinq ou six vaisseaux d’Europe, autant de l’Inde et faire descendre petit à petit leur monde : il serait, vous le voyez, bien aisé aux Anglais de s’emparer de Madras à moins d’y entretenir une garnison de deux mille Européens. C’est par cette raison que nous avons mis que la rade de Madras ne pourrait être fréquentée par les Anglais. »