Page:Malleson - Histoire des Français dans l’Inde.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
87
ÉTAT DU CARNATE

de Shere-Klian-Lodi et de Dost-Ali. Les réponses qu’il en reçut montrèrent que l’estime professée de tous temps par les nababs du Garnate pour le représentant de la nation française n’était pas une vaine et fugitive apparence. Anwaroudin, le représentant de ses chefs, avait conservé leurs traditions ; il répondit à l’appel de Dumas en se montrant plus fidèle à ses promesses qu’on ne l’est souvent en Europe, et Pondichéry fut sauvé. Pour rendre plus clair et plus intelligible le récit des faits qui vont se succéder, il est nécessaire de rapporter brièvement les principaux événements qui avaient eu lieu dans le Garnate depuis que nous l’avons quitté.

Le Garnate souffrant de la famine causée par Finvasion des Mahrattes ; Chunda-Sahib prisonnier à Sattara ; son beau-frère, le nabab Sufder-Ali pressé par son suzerain de payer les arrérages du tribut ; telle était la situation où se trouvait le Garnate au milieu de 1741 ; elle était plus triste encore pour le peuple que pour le souverain, car le peuple avait été pillé et mourait de faim, tandis que les trésors de Sufder-Ali étaient demeurés intacts dans les murs de Pondichéry. Malgré ses dénégations il avait encore plus de richesses qu’il n’en fallait pour payer les arrérages réclamés par le soubab ; mais il ne lui convenait pas de le faire. Le soubab n’avait pas appuyé sa réclamation par la force et Sufder-Ali était résolu à ne pas obtempérer à une simple demande verbale. Il leurra donc le soubab par des défaites et pour se préparer à tout événement, il transféra sa résidence à Vellore, et ses trésors à Madras, sous la garde des Anglais[1] ; mais une crise était imminente ; l’impôt dont Sufder-Ali avait dû frapper sa noblesse pour payer le tribut imposé par les Mahrattes l’avait rendu extrêmement impopulaire. Dans le but de s’y soustraire, ses courtisans avaient organisé une conjuration, à laquelle ils étaient d’ailleurs encouragés par la nature peu amicale de ses relations avec le soubab. Ils étaient convaincus que sa chute serait bien accueillie de ce côté. Au nombre des conspirateurs se trouvait son autre beau-

  1. Orme affirme qu’il avait transporté sa confiance, quant à la garde de ses trésors et de sa famille, des Français aux Anglais, à l’instigation de son premier ministre, Meer-Assud, qui suspectait l’existence de quelque lien entre Chunda-Sahib et Dupleix. Ce Meer-Assud fut l’ennemi invétéré de Chunda-Sahib et la cause de tous ses malheurs.