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jovial conte, je goûte, mais oublieux alors d’un ministre tout autre qui égayait mon souvenir, figure comme découpée dans l’usure d’une tapisserie pareille à celle où il lui faut rentrer pour mourir : falot, inconsistant bouffon d’âge, de qui le cadavre léger n’implique, laissé à mi-cours de la pièce, pas d’autre importance que n’en donne l’exclamation brève et hagarde « un Rat ! » Qui erre autour d’un type exceptionnel comme Hamlet, n’est que lui, Hamlet : et le fatidique prince qui périra au premier pas dans la virilité, repousse mélancoliquement, d’une pointe vaine d’épée, hors de la route interdite à sa marche, le tas de loquace vacuité gisant que plus tard il risquerait de devenir à son tour, s’il vieillissait. Ophélie, vierge enfance objectivée du lamentable héritier royal, reste d’accord avec l’esprit de conservatoires moderne : elle a du naturel, comme l’entendent les ingénues, préférant à s’abandonner aux ballades introduire tout le quotidien acquis d’une des savantes d’entre nos comédiennes ; chez elle éclate non sans grâce, telle intonation parfaite, dans les pièces du jour, là où l’on vit de la vie. Alors je surprends en ma mémoire, autres que les lettres qui groupent ce mot Shakespeare, voleter de récents noms qu’il est sacrilège même de taire, car on les devine.