Page:Mallarmé - Notes sur le théâtre.djvu/19

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moi, chaque hiver, un des plus exquis et poignants ouvrages de MM. de Goncourt, renée mauperin : car vous devinez, quoique dire traîne en longueur et recule au plus loin de la cadence ordinaire une conclusion relative à l’un des princes des lettres contemporaines, que tout cet artifice dilatoire de respect vise la si intéressante, habile et quasi originale adaptation qu’a faite du chef-d’œuvre, une tolérance amicale l’y invitant, mon collaborateur ici M. Céard. Au manque de goût aisé de chuchoter des vérités que mieux trompette l’œuvre éclatant du romancier, cette atténuation : que je réclame moins en raison d’une vue théâtrale à moi que pour l’intégrité du génie littéraire, à cause simplement du milieu peut-être plus grossier encore, s’il le restitue, même scéniquement, à l’existence, après l’en avoir tiré par le fait des procédés délicieux et fugitifs de l’analyse.

Et… et… je parle d’après quelque perception aussi qu’a de l’atmosphère un poète transporté même dans le monde, répondez s’il demeure un rapport satisfaisant ou quelconque entre la façon d’exister et de dire forcément soulignée des comédiens en exercice, et le caractère tout d’insaisissable finesse de la vie. Conventions ! et vous implanterez, au théâtre, avec plus de vraisemblance le paradis de vos songes, qu’un salon.

Figurativement, ainsi tout se passe, même en la comédie, depuis les temps du Tréteau sommaire, quand la rampe se prêta à l’éclair métaphorique de vérités.

À une distance d’un mois et plus, pour parler de ce succès continu du Théâtre Français, La Vieillesse de Scapin, un effet par exemple, prodigieux, simple me hante, c’est la fuite, nulle part mais accomplie en dernière ressource, avec férocité, de celle qui échappe à tout, à ses dupes à leurs cris, au châtiment, du fait de son commerce surnaturel et d’une mauvaise innocence