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cueillir des fleurs dans les cliamps d’Enna, et l’emporta en sa sombre résidence sur un char traîné par quatre chevaux noirs comme le charbon. Le sombre palais était gardé par les chiens monstrueux Orthros et Cerbère, ce dernier à trois têtes. Remarquez qu’il est fait mention de ces monstres dans les traditions de quelques autres peuples : ils reparaissent comme Vritra et Sarvara, noms appliqués aux puissances de l’ombre dans l’ancienne tradition des Hindous.

Hadès (fig. 36) était connu sous d’autres noms : on l’appelait Plouton, d’où le Pluton latin, soit le gardien de tous ces trésors minéraux de la terre, que surveille Andvari, le nain, dans l’histoire teutonique de Sigurd. Le nom Polygdémon (ou le roi qui « reçoit beaucoup » d’êtres dans sa demeure invisible) lui était encore attribué ; et il n’y a qu’une légère variante de ce nom à celui de Polydecte, roi de Sériphos, qui persécute Danaé, mère de Persée. Le mot, toutefois, arriva à désigner non plus le prince seulement du monde invisible, mais le monde invisible lui-même.

Hadès a été considéré comme le Zeus des séjours inférieurs, et ainsi les trois noms Zeus, Hadès et Poséidon semblent avoir désigné simplement les idées de souveraineté et de pouvoir, avant qu’on les assignât aux dominateurs spéciaux du ciel, de la mer et des séjours inférieurs. Comment se fait-il, me dira-t-on, que Hadès, étant, comme Zeus, fils de Cronos, ne comptât pas au nombre des douze dieux réglementaires de l’Olympe ? Simplement parce que son empire gisait sous terre. On ne connaît pas cette distinction dans les poèmes homériques : il y a le pouvoir d’aller à l’Olympe quand bon