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les gonfanons au vent. Il ne peut compter ces bataillons : tant il y en a qu'il n'en peut savoir le nombre. Il en est lui-même tout égaré. Il dévale du puy comme il peut; il vient aux Français et leur raconte tout. Vestige poétique antérieur, parvenu jusqu’à présent, voilà un fragment du chant composé en l’honneur de la « Buona pulcella » que « fut Eulalia » : Elle n’ont eslkutet les mais conseillers, Qu’elle Deo raneiet chi maent sus en ciel, Ne por or ned argent ne paramenz, Por manatce rcgiel ne preimen; Neule cose non la povret omque pleier, La polie s’empre non amast lo deo menestier. Il est dit, d’Eulalie la bonne jeune fille : « Elle n'eût écouté les mauvais conseillers (voulant) qu'elle reniât le Dieu qui demeure là-haut au ciel, ni pour or, ni pour argent, ni pour parure, ni pour menaces royales, ni pour prières; aucune chose ne la put oncques plier, la jeune fille, à ne pas aimer toujours le service de Dieu. » Si l’une ou l’autre de ces citations ne contient pas les matériaux nécessaires à l’étude d’une langue, toutefois y notera-t-on deux points : c’est d’abord que dans le morceau du xne siècle principalement apparaît mainte similitude avec le Français moderne; et cependant quelques points de contact, dans le morceau du Xe siècle, se montrent encore avec le Latin. Pour distinguer ici et là ce double trait saillant, comme on a, en l’absence d’un échantillon de la date même, pris deux morceaux, le premier d’un peu avant, le second de tout après, il convenait de les choisir, dans le même dialecte, ou parler de l’Ile-de-France : or, c’est aussi le seul qui offre trace écrite. La divergence qui existe entre le Français ou dialecte de l’Ile-de-France et ses rivaux même le Normand, toute considérable dans le détail, n’infirmerait cependant pas le rapport évident présenté par un d’eux, si on en avait trace écrite, avec le Français du xixe siècle, d’une part et de l’autre avec le Latin. Oui, et c’est de l’idiome de Virgile et de Tacite ou de ses formes populaires que vient presque absolument ce vieux Français, distinct surtout du nôtre à cette époque encore par un vestige de déclinaison; où se trouvent deux cas. Le nominatif et l’accusatif fournissent en effet nos noms et nos adjectifs, le dernier reconnaissable à une n persistant jusque dans l’Anglais*. Pourquoi ces deux demeurés seuls : sinon à cause de la grande difficulté qu’éprouvèrent les

  • Ex. fashion, de façon (de factio-n-em).