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de Guillaume-le-Conquérant en 1066. Combats, défaites et victoires entre les mots ainsi qu’entre les hommes; oui. Des deux langages qui se trouvent là en présence, l’un est-il un idiome inculte, vague et fait pour s’évanouir : l’autre, un parler mobile encore et sans caractère, stable aucunement ? Voyons. L’Anglo-Saxon, vigoureux, car le rameau autochtone de l’Anglais moderne n’en fournit, après tout, que le développement plus ou moins modifié par notre présence, a laissé, dans l’histoire littéraire de l’Europe au moyen-âge, une poésie qui atteste de délicates perfections. Quiconque étudie le passé de notre langue sait aussi qu’au xie siècle s’arrêtait précisément la période de croissance naturelle; tout ce qui y a été ajouté depuis, œuvre de savant, voulue et spécieuse. Le mélange de deux éléments très parfaits ne semblait devoir, par conséquent, s’opérer qu’avec la plus grande difficulté : j’ai dit défaites, victoires et combats. A ces pages tout historiques, il appartient de fournir des indications sur ce que se montraient là l’Anglo-Saxon, ici la langue d’Oil, dont le dialecte parlé par les Normands ne fut qu’une variété spéciale. La netteté de coup d’œil jeté des deux côtés à la fois du bras de mer appelé maintenant la Manche, importe à l'intelligence d’un Traité, qui montre la formation de l’Anglais; car il n’y a eu d’Anglais, authentiquement, qu’après la fusion du double alliage. Un stricte analyste pourrait, comme antérieur à la langue actuelle qui l’occupe, rejeter les quelques détails présentés bientôt : somme toute, un démonstrateur, point. § 2. Anglo-Saxon. Le Gothique produit deux rameaux, celui Haut-Allemand et celui Bas-Allemand. Écartons le premier, il s’appela : le Vieux Haut-Allemand, représenté par ces travaux, la paraphrase des Livres Saints d’Otfrid et de Notker et le Moyen Haut-Allemand, ennobli par cette œuvre, Y Epopée des Niebelungen; enfin ie Haut-Allemand moderne qu’inaugure Luther avec sa traduction de la Bible, ou, depuis, l’Allemand tout court. A ses différents états de développement, tel le grand idiome parlé à présent par le centre de l’Europe. Quant au rameau Bas-Allemand, étudiez-le exclusivement et avec quelque détail : la trace littéraire la plus ancienne qu’il laisse dans le passé, c’est au ive siècle, la version des Evangiles donnée par Ulphilas en Mœso-Gothique, parler ainsi nommé des villages de la Dacie où il se fit jour. Ce document, le plus vieux titre écrit de sa famille que possède l’Anglais aujourd’hui, frappe le regard moderne par un air de grandeur et l’archaïque roideur de riches