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SUR L’IDÉAL A VINGT ANS Valvins près Fontainebleau, 17 août 1898. Monsieur, Quel était mon idéal à vingt ans, rien d’improbable que je l’aie même faiblement exprimé, puisque l’acte, par moi choisi, a été d’écrire : maintenant, si l’âge mûr l’a réalisé, ce jugement appartient aux personnes seules m’ayant prolongé leur intérêt. Quant aux appréciations autobiographiques intimes, de celles à quoi on se livre, particulièrement, seul ou en présence d’un hôte rare, j’ajouterai, dans le journal, selon votre souhait, en vue de proférer quelque chose, que, suffisamment, je me fus fidèle, pour que mon humble vie gardât un sens. Le moyen, je le publie, consiste quotidiennement à épousseter, de ma native illumination, l’apport hasardeux extérieur, qu’on recueille, plutôt, sous le nom d’expérience. Heureuse ou vaine, ma volonté des vingt ans survit intacte. Veuillez, Monsieur, agréer... Stéphane Mallarmé. I. Je n’ai point ici, en mon séjour d’été, mon portrait à vingt ans et regrette. II. Jamais pensée ne se présente à moi, détachée, je n’en ai pas de cette sorte et reste ici dans l’embarras ; les miennes formant le trait, musicalement placées, d’un ensemble et, à s’isoler, je les sens perdre jusqu’à leur vérité et sonner faux : après tout, cet aveu, peut-être, en figure-t-il une, propre au feuillet blanc d’un album. S. M.