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que peut-être cet esprit immédiat ou originel, Théodore de Banville et l’épuration, par les ans, de son individualité en le vers, le désigne aujourd’hui un être à part, supérieur et buvant tout seul à une source occulte et éternelle; car rajeuni dans le sens admirable par quoi l’enfant est plus près de rien et limpide, autre chose d’abord que l’enthousiasme le lève à des ascensions continues ou que le délire commun aux lyriques : hors de tout souffle perçu grossier, virtuellement la juxtaposition entre eux des mots appareillés d’après une métrique absolue et réclamant de quelqu’un, le poëte dissimulé ou chaque lecteur, la voix modifiée suivant une qualité de douceur ou d’éclat, pour chanter. Ainsi lancé de soi le principe qui n’est — que le Vers ! attire non moins que dégage pour son épanouissement (l’instant qu’ils y brillent et meurent dans une fleur rapide, sur quelque transparence comme d’éther) les mille éléments de beauté pressés d’accourir et de s’ordonner dans leur valeur essentielle. Signe ! au gouffre central d’une spirituelle impossibilité que rien soit exclusivement à tout, le numérateur divin de notre apothéose, quelque suprême moule qui n’ayant pas lieu en tant que d’aucun objet qui existe : mais il emprunte, pour y aviver un sceau tous gisements épars, ignorés et flottants selon quelque richesse, et les forger. Voilà, constatation à quoi je glisse, comment, dans notre langue, les vers ne vont que par deux ou à plusieurs, en raison de leur accord final, soit la loi mystérieuse de la Rime, qui se révèle avec la fonction de gardienne et d’empêcher qu’entre tous, un usurpe, ou ne demeure péremptoirement : en quelle pensée fabriqué celui-là ! peu m’importe, attendu que sa matière discutable aussitôt, gratuite, ne produirait de preuve à se tenir dans un équilibre momentané et double à la façon du vol, identité de deux fragments constitutifs remémorée extérieurement par une parité dans la conson-nance*.

  • La est la suprématie de modernes vers sur ceux antiques formant un tout et ne rimant pas; qu’emplissait une bonne fois le métal employé à les faire, au lieu qu’ils le prennent, le rejettent,