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sarts doit être fier d’avoir trouvé sa forme. Et cela, je crois qu’il le doit à sa sincérité : il n’a glané nulle part, il a semé chez lui. Ses croyances sont dans son livre et sa jeune expérience aussi. De là, il a senti que toute époque peut être lyriséc, et a compris qu’on pouvait chercher l’idéal hors de l’antiquité, du moyen âge, de la Renaissance ou du siècle Pompadour, dans la consciencieuse étude de son âme et dans la franche observation de son temps. LA MILANAISE ET L’AUTRICHIEN Drame en trois actes et en prose par M. Léon Marc. (Le Sémnais. Journal de l’Yonne. Sens, mercredi 19 mars 1862 *,) Un théâtre aujourd’hui : une grange, demain, après-demain : vingt planches sur quatre tonneaux. Il faut jouer, jouer toujours, et jouer partout : voilà la vie extérieure. Pénétrez dans la vie intérieure. On essuie son fard, et l’on n’a pas le temps d’être soi-même avant d’en remettre de nouveau. Ruy Blas de demain, cours à la répétition. — J’étudie, — Ruy Blas de demain, pense à coudre du jais sur ton pourpoint noir. — J’étudie. — Ruy Blas de demain, n’oublie point ton inepte lever de rideau. — J’étudie. Et voyez qu’il ne se plaint pas de ce que ce morcellement fatal ae son existence le prive de vivre, mais de ce qu’il l’empêche d’étudier. Vivre, il a rayé ce mot du livre de ses espérances. Il a bien le temps de vivre sa vie, celui qui, dans les pérégrinations de la semaine, sera sans prendre haleine Gennaro, Croque-Poule, Schau-nard, Othello, même M. Ci et M. Ça du Théâtre-Français ! Il est pourtant des comédiens qui font plus que de vivre : qui rêvent. Oui, j’en sais qui pensent, qui chantent. Je n’examine pas leur pensée ou leur chanson : eussent-ils filtré la poésie de Legouvé ou souri du bout des lèvres

  • Cet article parut dans ce bi-hebdomadaire de Sens sous le titre Variétés.