en lumière). J’extrais. « En discutant du Corbeau (écrit Mme Suzan Achard Wirds à M. William Gill) M. Poe m’assura que la relation par lui publiée de la méthode de composition de cette œuvre n’avait rien d’authentique; et qu’il n’avait pas compté qu’on lui accordât ce caractère. L’idée lui vint, suggérée par les commentaires et les investigations des critiques, que le poëmc aurait pu être ainsi composé. Il avait en conséquence produit cette relation, simplement à titre d’expérience ingénieuse. Cela l’avait amusé et surpris de la voir si promptement acceptée comme une déclaration faite bond fide. » Révélation très piquante, quand on se souvient de ce qui, un instant, se dépensa de notre vitalité littéraire à défendre comme à attaquer la théorie poétique très neuve qui venait tout à coup d’une lointaine Amérique. Peut-être à tort, selon moi : car l’art subtil de structure ici révélé s’employa de tout temps à la disposition des parties, dans celles d’entre les formes littéraires qui ne mettent pas la beauté de la parole au premier plan, le théâtre notamment. Ses facultés d’architecte et de musicien, les mêmes en l’homme de génie, Poe, dans un pays qui n’avait pas à proprement parler de scène, les rabattit, si je puis parler ainsi, sur la poésie lyrique, fille avérée de la seule inspiration. Tout l’extraordinaire est dans cette application, nouvelle, de procédés vieux comme l’Art. Y a-t-il, à ce spécial point de vue, mystification ? Non. Ce qui est pensé, l’est : et une idée prodigieuse s’échappe des pages qui, écrites après coup (et sans fondement anecdotique, voilà tout) n’en demeurent pas moins congéniales à Poe, sincères. A savoir que tout hasard doit être banni de l’œuvre moderne et n’y peut être que feint; et que l’éternel coup d’aile n’exclut pas un regard lucide scrutant l’espace dévoré par son vol. Noir vagabond des nuits hagardes, ce Corbeau, si l’on se plaît à tirer du poème une image significative, abjure les ténébreux errements, pour aborder enfin une chambre de beauté, somptueusement et judicieusement ordonnée, et y siéger à jamais.