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morte si jeune — une psalmodie pour elle, deux fois morte parce qu’elle est morte si jeune. « Misérables ! vous l’aimiez pour sa richesse et la haïssiez pour son orgueil, et quand sa santé chancela, vous la bénissiez — parce qu’elle mourait. Comment donc le rituel sera-t-il lu ? — Le Requiem, chanté — par vous — par toi, l’œil mauvais : par toi, la langue infamante, qui avez causé la mort de l’innocence qui est morte si jeune ?» « — Peccavinius ; mais ne délire pas de la sorte ! et qu’un chant du sabbat monte à Dieu si solennellement que la morte ne sente de mal ! La suave Lénore a « pris les devants » avec l’espoir qui volait à côté, te laissant dans l’égarement à cause de cette chère enfant qui aurait été ton épousée — elle la belle et de grand air qui maintenant gît si profondément, la vie sur sa blonde chevelure mais pas dans les yeux — la vie là encore, sur la chevelure — la mort aux yeux. » « Arrière ! ce soir j’ai le cœur léger. Je n’entonnerai de chant mortuaire, mais soutiendrai, dans son vol, l’ange par un Péan des vieux jours ! Que ne tinte le glas ! — de peur que son âme suave, parmi sa religieuse allégresse, n’en saisisse la note, comme Elle plane sur la Terre maudite. Vers les amis d’en haut, aux démons d’en bas le fantôme indigné s’arrache — à l’Enfer, vers une haute condition au loin dans les Cieux — aux pleurs et aux plaintes, vers un trône d’or à côté du Roi des Cieux. » MNNMBEL LEE Il y a mainte et mainte année, dans un royaume près de la mer, vivait une jeune fille, que vous pouvez connaître par son nom d’Annabcl Lee : et cette jeune lille ne vivait avec aucune autre pensée que d’aimer et d’être aimée de moi. J’étais un enfant, et elle était un enfant, dans ce royaume près de la mer; mais nous nous aimions d’un amour qui