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Les relations de Manet et de Mallarmé furent immédiatement fréquentes : la proximité des ateliers successifs du peintre facilitait au poëte des visites qui devinrent quotidiennes, au retour du lycée Condorcet vers la rue de Rome; et en 1885, deux ans après la mort de Manet, il écrivait à Verlaine : « J’ai, dix ans, vu tous les jours mon cher Manet, dont l’absence aujourd’hui me paraît invraisemblable. » Ce qui, aussi, daterait bien de 1873 leur première rencontre. Méry Laurent fut au centre de cette amitié. P. 700. ERECHTHEUS (Paris, janvier 1875.) Cet article a paru sous le titre : Les Livres : Erechtheus, tragédie par Swinburne (pp. 104-105 du 3e numéro de la République des Lettres en date du 20 février 1876). A la fin de décembre 1875, Mallarmé qui, en juillet précédent, avait reçu une lettre de Swinburne pour le remercier de l’envoi de sa traduction du Corbeau d’Edgar Poe, écrivit au grand poëte anglais pour lui demander de vouloir bien collaborer à une revue qui venait de se fonder sous le titre de la République des Lettres et sous la direction de Catulle Mendès. Swinburne s’empressa de répondre à cette demande en envoyant un poëme en français, une sextine intitulée Nocturne. En même temps, il adressait à Mallarmé un exemplaire de son dernier ouvrage qui venait tout justement de paraître. « Quelle merveille qu’Erechtheus ! » écrivait Mallarmé à Arthur O’Shaughnessy le 9 janvier 1876, « Swinburne a eu la bonté de me le faire envoyer par Chato : si j’en parlais, ce serait pendant des pages. » Au mois de juillet précédent, Swinburne, interrompant un volume d’études sur Shakespeare, commença chez son ami Jowett, à Wcst Malvern, une tragédie sur le sujet d’Erechtée, roi d’Athènes des temps légendaires, et le sacrifice de sa fille Chthonia. En novembre suivant, l’œuvre était terminée, et, envoyée aussitôt à l’impression, elle paraissait dans les premiers jours de 1876. C’est l’un des ouvrages les mieux composés du grand poëte anglais et celui où il s’est approché le plus du style eschylicn. Les personnages d’Erechtheus, de la reine Praxithea et de Chthonia y sont dessinés avec une émouvante puissance et les chœurs des Vieillards athéniens sont parmi les plus heureuses inspirations du pocte. Le 27 janvier 1876, Mallarmé remerciait Swinburne de son envoi en ccs termes : « Le grand remerciement que je voulais vous adresser à la fin de ma lettre n’est pas encore pour Erechtheus, car véritablement, bien que ce soit exquis à vous d’avoir songé à me le faire envoyer, l’enthousiasme après quelques pages s’est substitué à la gratitude, et il a fini par régner exclusivement et souverainement sur toutes