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Quand Mallarmé revint de Londres, l’admiration particulière cju’il nourrissait pour Edgar Poe était bien connue de ses amis, ainsi que son intention de traduire scs poëmes. Dans une lettre du 7 avril (1864) Emmanuel des Essarts lui dit, à propos d’Albert Collignon, directeur à cette époque de /<7 Revue Nouvelle : « 11 attend tes poëmes en prose et voudrait bien avoir quelques-unes de tes traductions de Poe... » En décembre précédent, Mallarmé avait écrit à ce même Collignon : « Je n’ai pu traduire les trois poëmes inédits d’Ed. Poe dont nous étions convenus. » Le 11 avril 1864, comme Collignon était revenu à la charge, Mallarmé lui répondait : « Quand vous aurez aussi épuisé mes vers, je vous enverrai trois traductions de courts poèmes d’Ed. Poe, — les seuls qui n’aient pas été traduits. Mais je préfère avoir quelque chose, — en prose et en vers, — d’original avant ces calques d’un inimitable poëte. » Mais la Revue Nouvelle cessa de paraître deux mois plus tard, avant que rien n’y fut inséré de Mallarmé. Poe est un de scs héros; lui comparer quelqu’un est la suprême louange : il en use à l’égard d’Henri Cazalis : « Tu ne sautais croire quelle profonde impression m’ont causée les vers que tu m’as donnés. Toi seul, Edgar Poe et Baudelaire, étiez capables de ce poëme qui, comme certains regards de femme, contiennent des mondes de pensées et de sensations. » (Juillet 1864.) Cette admiration ou cet intérêt pour Edgar Poe poëte ne sont plus à cette époque exceptionnels; c’est ainsi qu’un des amis de Mallarmé, Armand Renaud, publie dans la Revue de Paris du Ier août 1864, un article sur Edgar Poe d'après ses poésies, au cours duquel il donne les traductions d’Annabel Eee, Silence, h Cité dans la Mer, la l’allée du Malaise. En 1867, lorsque Villiers de l’Isle-Adam, qui n’ignore pas Edgar Poe, devient rédacteur en chef de la Revue des Eettres et des Arts, son premier soin est d’ccrire à Mallarmé (zo sept. 1867) : « J’attends votre copie des poemes en prose et des poésies de Poe », et la semaine suivante : « Je regrette bien que vous ne m’ayez pas envoyé le Eac d’Auber (Ulalume) ou telle autre chose de lui; mon cher ami, cela ferait rudement bien, et avec votre traduction trahs-lucide, ça ferait ma fortune. » (27 septembre 1867.) Mais la Revue des Eettres et des Arts, elle aussi, disparut sans avoir pu insérer les traductions des poemes d’Edgar Poe, que Mallarmé ne lui envoya vraisemblablement pas, car, en revanche, cinq des poëmes en prose de celui-ci y parurent d’octobre 1867 à janvier 1868. Mallarmé communiqua-t-il, dès cette époque, à l'un ou l’autre de ses amis, ses traductions d’Edgar Poe ? sa correspondance n’en fournit aucune preuve et il semble que sa réputation de traducteur des poëmes de Poe ait été alors une sorte de lieu commun qui ne réclamait pas de témoignages. On n’a retrouvé, de cette période de la vie du pocte, le manuscrit d’aucune de ces traductions. Et ce 11’cst qu’en 1872 que certaines d’entre elles virent