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laisse assonancée de chanson de geste. Elles développent sur la voyelle aiguë et contractée la monotonie d’un vaste espace solitaire, silencieux, tout blanc de glace dure... Les derniers vers des tercets reproduisent transversalement la même ligne d’assonances, en parallèles. Le dernier vers des quatrains ctale d’un grand geste nu, sous le soleil froid qui l’éclaire, la congélation qu'il exprime. Dans le dernier vers du sonnet, le dernier mot, la longue du Cygne, soulignée visuellement par la majuscule (rare chez Mallarmé), isolée et mise en valeur entre trois syllabes demi-muettes, arrête avec sûreté et poids l’oiseau dans cet espace de consonances, blanc comme lui, et d<4nt en lui se gonfle le cœur harmonieux, nostalgique, douloureusement. » (La Poésie de Stéphane Mallarmé, p. 250.) De Mme E. Noulet ces lignes : « Aucun poëme ne fut plus commenté ni plus paraphrasé; aucun ne fut plus inconnu. Personne qui n’ait vu en lui le contraire de ce qu’il dit, et qui n’ait tiré de lui la citation qui illustrât la thèse qu’il ne défend pas. Traduit à contresens, il était facile de lui trouver des antécédents. Trop influencé par le Cygne de Baudelaire ou l’Albatros ou les Torts du Cygne de Banville, on a vu en lui le développement du thème romantique, devenu banal : le poëte prisonnier des contingences de la vie, exilé de sa pureté natale. C’est le Moïse de Vigny qu’isole son génie et qui est près de le maudire. Interpréter ainsi le sonnet de Mallarmé, c’cst l’avoir mal lu; c’est en faire une réplique des Fenêtres, plutôt que de l’A^ttr... » (L’Œuvre poétique de Mallarmé, p. 263.) On se rappelle que dans A la recherche du Temps perdu, de Marcel Proust, le narrateur, au cours de la lettre de rupture qu’il adresse à Albertine, cite le second quatrain de cc sonnet que, dit-il, il se propose de faire graver sur son yacht. {Albertine disparue, I, p. 66.) P. 68. VICTORIEUSEMENT... (Paris, 1885.) Ce sonnet fut envoyé à Paul Verlaine, à la fin de 1885, pour être incorporé à la notice consacrée par lui à Stéphane Mallarmé dans la série des Hommes d'aujourd’hui que publiait alors l’éditeur Léon Vanier, sous l’aspect d’une double feuille dont la première page était occupée par un portrait-charge dessiné par Luque : le tout pour la modique somme de 10 centimes. Ccttc pièce figure, page 4, à la fin de la notice, sous le titre Sonnet mais sous un premier aspect, si différent du texte définitif qu’il n’est pas sans intérêt de pouvoir les comparer. SONNET Toujours plus souriant au désastre plus beau. Soupirs de sang, or meurtrier, pâmoison, fêle ! Une millième fois avec ardeur s’apprête Atoii solitaire amour à vaincre le tombeau.