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avec, comme titre, Dédicace au Poëme Nocturne, titre barré et remplacé par Doit du Poëme. On a fait remarquer, de divers côtés, le rapprochement des mots Idumée et Palmes dans ce poëme comme dans le vers des Géorgiques (VIII, 12) Primas Idumteas referam tibi, Mantua, palmas. Rappelons aussi ces vers de la Satire IX où, invoquant Malherbe, Boileau dit : Et passant du Jourdain les ondes alarmées Cueillir, mal à propos, les palmes idumées / L’Idumée est le pays de l’Édom, pays d’Ésaü, 1 ’aîné déshérité en faveur du cadet Jacob, l’aîné hirsute et monstrueux. « Pour la cabale juive, continue Denis Saurat, Dieu avait créé d’abord une humanité monstrueuse. 11 la remplaça par l’humanité actuelle. Jacob remplaça Esaü : hommes pré-adamiques, rois d’Idumée. C’étaient êtres sans sexe, se reproduisant sans femmes, et non hermaphrodites à l’image de Dieu... Le poëte fait son poëme seul, sans femme, comme un roi d’Idumée, monstrueuse naissance. Ce monstre sera humanisé si la femme l’accueille, le nourrit de son lait... » « La présence du mot Idumée ne tient-elle qu’à ce souvenir classique ? ou, plus organique au poëme, à son sens biblique ? L’Idumée, haïe du peuple élu et des prophètes, nom de malheur ? L’enfant-poëmc d’une nuit d’Idumée, d’avance détesté, peut-être destiné à la destruction, ne trouve en tout cas l’accueil que d’un « sourire ennemi ». (E. Noulet, l'Œuvre poétique de Stéphane Mallarmé, Droz, Paris, p. 397.) Dans ses Commentaires, M. Charles Mauron voit dans « l’enfant d'une nuit d’Idumée » Hérodiade, le poëme auquel toute la nuit a travaillé le Songeur, et rapproche de Par le verre brillé d'aromates et d'or le vers A’Hérodiade : Mais de l’or, à jamais vierge des aromates. Comparant les deux versions adressées à Aubanel, André Thérive a écrit : « On remarquera sans doute que les variantes apportées ne sont point du tout dans le sens de la clarté telle que l’entendait Aubanel. Elles marquent au moins le goût magistral et une délicatesse impondérable. » (J .a Revue universelle, 1er novembre 1923.)