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FRANÇOIS DE MALHERBE

Il semble que jamais sa tête
Ne fut plus voisine des cieux.

Au delà des bords de la Meuse,
L’Allemagne a vu nos guerriers,
Par une conquête fameuse,
Se couvrir le front de lauriers.
Tout a fléchi sous leur menace ;
L’Aigle même leur a fait place,
Et, les regardant approcher,
Comme lions à qui tout cède,
N’a point eu de meilleur remède
Que de fuir et se cacher.

Ô reine, qui pleine de charmes
Pour toute sorte d’accidents,
As borné le flux de nos larmes
En ces miracles évidents,
Que peut la fortune publique
Te vouer d’assez magnifique,
Si, mise au rang des immortels
Dont ta vertu suit les exemples,
Tu n’as avec eux, dans nos temples,
Des images et des autels ?

Que saurait enseigner aux princes
Le grand démon qui les instruit,
Dont ta sagesse en nos provinces
Chaque jour n’épande le fruit ?
Et qui justement ne peut dire,
À te voir régir cet empire,
Que, si ton heur était pareil
À tes admirables mérites,
Tu ferais dedans ses limites
Lever et coucher le soleil ?