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FRANÇOIS DE MALHERBE

 
Nous privera de sa valeur,
Nous n’avons jamais eu d’alarmes
Où nous ayons versé des larmes
Pour une semblable douleur.

Je sais bien que par la justice,
Dont la paix accroît le pouvoir,
Il fait demeurer la malice
Aux bornes de quelque devoir,
Et que son invincible épée
Sous telle influence est trempée,
Qu’elle met la frayeur partout
Aussitôt qu’on la voit reluire :
Mais quand le malheur veut nous nuire,
De quoi ne vient-il point à bout ?

Soit que l’ardeur de la prière
Le tienne devant un autel,
Soit que l’honneur à la barrière
L’appelle à débattre un cartel,
Soit que dans la chambre il médite,
Soit qu’aux bois la chasse l’invite,
Jamais ne t’écarte si loin,
Qu’aux embûches qu’on lui peut tendre
Tu ne sois prêt à le défendre,
Sitôt qu’il en aura besoin.

Garde sa compagne fidèle,
Cette reine, dont les bontés
De notre faiblesse mortelle
Tous les défauts ont surmontés.
Fais que jamais rien ne l’ennuie ;
Que toute infortune la fuie ;
Et qu’aux roses de sa beauté
L’âge, par qui tout se consume,