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FRANÇOIS DE MALHERBE

 
À regarder croître l’ouvrage
Dont ce prince embellit ses bords.
Il se resserra tout à l’heure
Au plus bas lieu de sa demeure ;
Et ses nymphes dessous les eaux,
Toutes sans voix et sans haleine,
Pour se cacher furent en peine
De trouver assez de roseaux.

La terreur des choses passées
À leurs yeux se ramentevant
Faisait prévoir à leurs pensées
Plus de malheurs qu’auparavant ;
Et leur était si peu croyable
Qu’en cet accident effroyable
Personne les pût secourir,
Que, pour en être dégagées
Le ciel les aurait obligées,
S’il leur eût permis de mourir.

Revenez, belles fugitives ;
De quoi versez-vous tant de pleurs ?
Assurez vos âmes craintives,
Remettez vos chapeaux de fleurs.
Le roi vit, et ce misérable,
Ce monstre vraiment déplorable,
Qui n’avait jamais éprouvé
Que peut un visage d’Alcide,
A commencé le parricide,
Mais il ne l’a pas achevé.

Pucelles, qu’on se réjouisse ;
Mettez-vous l’esprit en repos ;
Que cette peur s’évanouisse,
Vous la prenez mal à propos ;