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L’ÉCOLE CLASSIQUE

Les Baisers de Dorinde


  LA douce haleine des zéphirs
  Et ces eaux qui se précipitent,
  Par leur murmure nous invitent
  À prendre d’innocents plaisirs.
  Dorinde, on dirait que les flammes
  Dont nous sentons brûler nos âmes,
  Brûlent les herbes et les fleurs ;
Goûtons mille douceurs à la faveur de l’ombre,
  Donnons-nous des baisers sans nombre,
Et joignons à la fois nos lèvres et nos cœurs.

  Quand deux objets également
  Soupirent d’une même envie,
  Comme l’amour en est la vie,
  Les baisers en sont l’élément.
  Il faut donc en faire des chaînes
  Qui durent autant que les peines
  Que je souffre loin de tes yeux.
Amour, qui les baisers aimes sur toutes choses,
  Fais une couronne de roses,
Pour donner à celui qui baisera le mieux.

  Ô que tes baisers sont charmants !
  Dorinde, tous ceux que tu donnes,
  Pourraient mériter des couronnes
  De perles et de diamants.
  Cette douceur où je me noie
  Force, par un excès de joie,
  Tous mes esprits à s’envoler ;
Mon cœur est palpitant d’une amoureuse fièvre,
  Et mon âme vient sur ma lèvre,
Alors que tes baisers l’y veulent appeler.

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