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MARC-ANTOINE DE SAINT-AMAND


 Ces tons, ensemble confondus,
  Font des accords funèbres,
 Dont les accents sont épandus,
  En l’horreur des ténèbres,
Que le silence abandonne à ce bruit
  Qui l’épouvante et le détruit.

 Lugubre courrier du Destin,
  Effroi des âmes lâches,
 Qui si souvent, soir et matin,
  M’éveilles et me fâches,
Va faire ailleurs, engeance de démon,
  Ton vain et tragique sermon.

 Tu ne me saurais empêcher
  D’aller voir ma Sylvie,
 Dussé-je, pour un bien si cher,
  Perdre aujourd’hui la vie.
L’heure me presse, il est temps de partir,
 Et rien ne m’en peut divertir.

 Tous ces vents, qui soufflaient si fort,
  Retiennent leurs haleines,
 Il ne pleut plus, la foudre dort,
  On n’oit que les fontaines
Et le doux son de quelques luths charmants,
  Qui parlent au lieu des amants.

 Je ne puis être découvert,
  La nuit m’est trop fidèle ;
 Entrons, je sens l’huis entr’ouvert,
  J’aperçois la chandelle,
Dieux ! Qu’est-ce ci ? Je tremble à chaque pas,
  Comme si j’allais au trépas.