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FRANÇOIS MAYNARD

Chanson


PÉGASE n’a point de mérite
Qui, dans les vers que je médite,
M’oblige à l’appeler divin,
Sinon que l’on me persuade
Que de sa fameuse ruade
Il naquit des sources de vin.

Mes désirs ne sont point esclaves
Des fontaines comme des caves ;
L’eau m’incommode et me déplait.
Il lui faut déclarer la guerre.
Elle assassine dans le verre
Le bon Denys, tout dieu qu’il est.

Çà, qu’on me donne une bouteille
Pleine de ce vin qui réveille
Les esprits les plus languissants !
Le nectar lui cède la gloire,
Et les dieux pour en venir boire
Se travestissent en passants.

Je demande sur toutes choses,
Garçon, que les portes soient closes
À qui voudra parler à moi.
Loin d’ici factions et brigues !
Si la couronne a des intrigues,
Laissons-les au conseil du roi.

Mon ambitieuse espérance,
D’un des premiers honneurs de France
Ne demande pas le brevet.
Ma barque aura le vent en poupe,
Tant que le flacon et la coupe
Seront mes armes de chevet.