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LES POÈTES DE L’ÉCOLE CLASSIQUE

MATHURIN RÉGNIER

Stances

QUAND sur moi je jette les yeux,
À trente ans me voyant tout vieux,
Mon cœur de frayeur diminue ;
Étant vieilli dans un moment,
Je ne puis dire seulement
Que ma jeunesse est devenue.

Du berceau courant au cercueil,
Le jour se dérobe à mon œil,
Mes sens troublés s’évanouissent.
Les hommes sont comme des fleurs,
Qui naissent et vivent en pleurs
Et d’heure en heure se fanissent.

Leur âge, à l’instant écoulé,
Comme un trait qui s’est envolé,
Ne laisse après soi nulle marque ;
Et leur nom, si fameux ici,
Sitôt qu’ils sont morts, meurt aussi,
Du pauvre autant que du monarque.

Naguères, vert, sain et puissant
Comme un aubépin florissant.
Mon printemps était délectable ;