Que d’une injuste offense il aura, quoiqu’il tarde,
Le juste châtiment.
Bien semble être la nier une barre assez forte
Pour nous ôter l’espoir qu’il puisse être battu ;
Mais est-il rien de clos dont ne t’ouvre la porte
Ton heur et ta vertu ?
Neptune, importuné de ses voiles infâmes,
Comme tu paraîtras au passage des flots,
Voudra que ses Tritons mettent la main aux rames,
Et soient tes matelots.
Là rendront tes guerriers tant de sortes de preuves,
Et d’une telle ardeur pousseront leurs efforts,
Que le sang étranger fera monter nos fleuves
Au-dessus de leurs bords.
Par cet exploit fatal en tous lieux va renaître
La bonne opinion des courages françois ;
Et le monde croira, s’il doit avoir un maître,
Qu’il faut que tu le sois.
Ô que, pour avoir part en si belle aventure,
Je me souhaiterais la fortune d’Éson,
Qui, vieil comme je suis, revint contre nature
En sa jeune saison !
De quel péril extrême est la guerre suivie,
Où je ne fisse voir que tout l’or du Levant
N’a rien que je compare aux honneurs d’une vie
Perdue en te servant ?
Toutes les autres morts n’ont mérite ni marque ;
Celle-ci porte seule un éclat radieux,
Qui fait revivre l’homme et le met de la barque
À la table des dieux.
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FRANÇOIS DE MALHERBE