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CHAP. 5’. LAVAGE A CHAUD DES LAINES. 105 température, elle a plus de douceur et se file plus aisément. Ce qu’il y a de certain, et ce qui paraît avoir élé constaté par M. Che- vreul, c’est que les laines qui ne sont lavées qu’après avoir été refroidies complètement prennent mieux la teinture et ne blanchis sent pas par le frottement et l’usure lors qu’elles sont confectionnées en draps et en habits. Quoiqu’il en soit, les paniers remplis de laine sont passés aux laveurs placés soit sur le bord de l’eau , soit dans un bateau , soit dans un tonneau défoncé d’un bout et en terré dans le massif du quai ou au milieu même du courant ; ceux-ci prennent les pa niers, les plongent dans l’eau jusque près des bords, les tiennent ainsi suspendus au moyen de cordes accrochées au bateau ou au tonneau, puis, à l’aide de la fourche ou des baguettes lisses, ils promènent vivement la laine , la soulèvent et l’ouvrent le plus Eossible, mais sans jamais la retourner , la rouiller ou en déterminer le feutrage. Lorsque la laine est suffisamment épurée, ce que l’on juge par sa teinte uniforme dans tous les brins, par sa blancheur , par l’eau qui en découle lorsqu’on la soulève et qui ne doit pas être colorée , ou parce que cette laine surnage à la surface sous forme de nuage, on l’enlève par poignée au moyen des baguettes, et on la jette dans des paniers ou sur des claies où elle s’égoutte, ou bien on la dépose sur des brouettes qui servent à la transporter au lieu où doit se faire le sé chage. Ce séchage s’opère ordinairement à l’air libre. Pour cela on étend la laine sur un gazon bien propre et bien fourni , ou bien sur un lit de cailloux de rivière de moyenne grosseur lavés avec soin , ou enfin sur des claies. Dans un grand nombre de lavoirs des environs de Paris, les laines fines sont sé- chées sur des toiles étendues sur le gazon on sur des filets suspendus par les extrémités. Cette dernière méthode donne la faculté de rassembler et rentrer très-promplement la laine s’il survient une pluie ou un orage. La plupart des agronomes conseillent d’éten dre la laine mouillée à l’ombre , parce que, disent-ils , le soleil gâte et durcit le brin en le desséchant trop promptement ; cependant des laveurs des environs de Paris , qui font sécher les laines les plus belles au soleil , ne paraissent pas en avoir éprouvé d’inconvénient, et sont peu disposés à renon cer à une méthode qui accélère le travail et le rend plus complet. Pendant que la laine est sur les cailloux ou sur le gazon, on la retourne souvent avec des fourches de bois et on la rentre le soir pliée dans de grandes toiles. Si une journée d’ex position sur le séchoir ne suffit pas, on l’é- tend de nouveau le lendemain ; ainsi de suite tous les jours jusqu’à parfaite dessiccation. Quand les laines ont été enlevées des cuves, on recommence une 2* opération, en ajoutant de l’eau de suint pour remplacer celle qui a été entraînée par la laine, et de l’eau chaude pour faire remonter au degré voulu la tem pérature du bain ; seulement quand l’eau devient trop bourbeuse, qn la soutire et on la remplace par de nouvelle eau de suint. AGRICULTURE. Pour sécher promptement la laine, surtout dans la saison avancée, et en même temps la rendre plus blanche en exprimant la plus grande quantité possible creau de lavage qui entraine toujours avec elle quelque saleté, on peut la tordre dans des toiles, la fouler dansles paniers, ou la mettre dans des caisses percées de trous, et la soumettre ainsi à l’action d’une petite presse. Les instrumens de ce genre que nous avons fait connaître dans les figures 45, 46, 47, 50 et 52 du tome III, et dont la forme est très-simple, pourraient être employés à cet usage. Après que la laine est bien sèche, on peut encore Véplucher à la main pour en retirer les pailles ou autres saletés qui n’ont pas été enlevées parle lavage et quialtèrent encore sa pureté. Alors on la transporte dans le maga sin, où elle est empilée dans de grandes cases en planches jusqu’à ce qu’elle soit emballée et expédiée. Par le lavage français, la laine fine de mérinos, dépouillée de son suint et d’une grande partie de sa matière grasse, perd 66 à 75 p. 0/0 de son poids, et conserve encore 4,5,6,7 p. 0/0 et au-delà de matière grasse, suivant la nature de la laine et le soin apporté dans les manipulations, ou les habi tudes du laveur. Un bon laveur n’est pas une chose com mune, et un ouvrier qui est habile dans cet art doit livrer des laines propres et bien pur gées, blanches, non cordées , nouées ou cas sées, et d’une nuance uniforme. Depuisbien long-temps on fait usage dans le midi de la France, et surtout dans le Lan guedoc, d’un excellent mode d’échaudage pour les laines, sans avoir recours à d’autre moyen de dessuintage que le suint lui-même, parce qu’on a reconnu que tous les autres agens durcissaient le brin et altéraient sa qualité. Pour cela on emploie une grande chau dière remplie d’eau qu’on fait chauffer do 40 ou 60° R. suivant que la laine est plus ou moins difficile à nettoyer. Au-dessus de 60° la laine serait altérée. On se sert de 2 filets à mailles serrées comme ceux employés par les teinturiers en laine. Lorsque I eau se trouve au degré de chaleur convenable à la laine qu’on veut dégraisser, on jette dans la chaudière un des filets chargé de 30 kilog. de laine en suint. On commence ordinaire ment la 1" jetée avec les basses qualités , soit patins, ou cuisses, pour garnir le bain de suint. Le bain ainsi garni, on commence une V* mise de laine fine, et on juge s’il est au degré nécessaire par le prompt dépouille ment du suint. Lorsque la laine est dans la chaudière on la remue avec un bâton, et après 5 ou 6 minutes de séjour on relève le filet avec un tour placé sur la chaudière et sem blable à celui des teinturiers. Pendant que cette l"mise égoutte, on jette le 2’ filet, dans lequel on met autant de laine que dans le 1" ; et durant l’intervalle que cette laine reste dans la chaudière, on porte la tr« mise aux laveurs. Dans le Midi, les paniers de lavage sont ronds, en fer ou en chêne ; d’autres sont en carré long entourés d’un filet à mailles ser- , rées. Le fond de ceux-ci est en planches de I chêne oonrque la laine ne puisse s’échapper. to.me III. — i4