Page:Malebranche - Méditations métaphysiques et correspondance, 1841.djvu/146

Cette page n’a pas encore été corrigée

faire attendre trop longtemps pour trop peu de chose, je réponds ici à votre lettre datée du 6 mai. Ma réponse obtiendra de vous et que vous rabattrez neaucoup de l'estime que vous avez de moi, et qu'en cela vous me rendrez justice, et elle ne vous donnera point aussi sujet de penser que je sis peu sensible à ce qui vous regarde.

J'ai relu, monsieur, vos lettres précédentes, et lu et relu votre dernière : et il me paraît que non seulement je vous ai marqué, dans celles que j'ai eu l'honneur de vous écrire, en quoi consistait le paralogisme de l'auteur, et la cause même de son erreur : qui est qu'il confond le monde, l'étendue créée, qui ne peut être l'objet immédiat de l'esprit, parce qu'il ne peut affecter l'esprit, agir en lui, avec l'idée de cette étendue, que j'appelle étendue intelligible, parce que c'est elle seule qui affecte l'esprit. Or cette étendue intelligible n'est point faite, elle est nécessaire, éternelle, infinie : c'est selon que je crois l'avoir prouvé l'essence de Dieu; non selon son être absolu, mais en tant que renfermant, entre toutes ses réalités ou perfections infinies, celle de l'étendue; car Dieu est partout. Mais l'étendue locale dont le monde et composé, Paris, Rome, mon propre corps - étendue qui n'est point l'objet immédiat de mon esprit -, n'existe point nécessairement. Car je conçois que quand Dieu aurait anéanti le monde créé, si Dieu m'affectait