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ont de réalité et de perfection : car l’Être infiniment parfait se suffit à lui-même, et tout ce qu’il a fait a sans cesse besoin de lui.

LE CHINOIS : Quoi, la souveraine sagesse serait sage elle-même. Il me paraît clair que cela se contredit : car les formes et les qualités sont différentes des sujets. Une sagesse sage ! comment cela ? c’est la sagesse qui rend sage, mais elle n’est pas sage elle-même.

LE CHRETIEN : Je vois bien que vous vous imaginez qu’il y a des formes et des qualités abstraites, et qui ne sont les formes et les qualités d’aucun sujet : qu’il y a une sagesse, une justice, une bonté abstraite, et qui n’est la sagesse d’aucun être. Vos abstractions vous trompent : quoi, pensez-vous qu’il y ait une figure aberrante, une rondeur, par exemple, qui rende ronde une boule, et sans laquelle un corps dont tous les points de la surface seraient également éloignés du centre ne serait point rond ? Lorsque je rends cette justice au Ly de dire de lui, qu’il est indépendant de la matière, sage,