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que je ne sais maintenant qu’y répliquer : mais elle est si abstraite qu’elle ne me convainc pas tout à fait. N’en auriez-vous point de plus sensible ?

LE CHRETIEN : Je vous en donnerai tant qu’il vous plaira. Car il n’y a rien de visible dans le monde que Dieu a créé, d’où on ne puisse s’élever à la connaissance du Créateur, pourvu qu’on raisonne juste. Et certainement je vous convaincrai de son existence, pourvu que vous observiez cette condition, prenez-y garde, de me suivre, et de ne me rien répliquer que vous ne le conceviez distinctement.

Lorsque vous ouvrez les yeux au milieu d’une campagne, dans l’instant même que vous les ouvrez’, vous découvrez un très grand nombre d’objets, chacun selon sa grandeur, sa figure, son mouvement ou son repos, sa proximité ou son éloignement, et vous découvrez tous ces objets par des perceptions de couleurs toutes différentes. Cherchons quelle est la cause de ces perceptions si promptes que nous avons de tant d’objets. Cette cause ne peut être, ou