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suis bien convaincu que quand je pense à l’infini, je suis très éloigné de penser à rien. Mais alors je ne pense point à un tel être, à un être particulier et déterminé. Or le Dieu que vous adorez n’est-ce pas un tel être, un être particulier ?

LE CHRETIEN : Le Dieu que nous adorons n’est point un tel être en ce sens, que son essence soit bornée : il est bien plutôt tout être. Mais il est un tel être en ce sens, qu’il est le seul Être qui renferme dans la simplicité de son essence, tout ce qu’il y a de réalité ou de perfection dans tous les êtres, qui ne sont que des participations (je ne dis pas des parties) infiniment limitées, que des imitations infiniment imparfaites de son essence. Car c’est une propriété de l’Être infini d’être un, et en un sens toutes choses : c’est-à-dire parfaitement simple, sans aucune composition de parties, de réalités, de perfections, et imitable ou imparfaitement participable en une infinité de manières par différents êtres.

C’est ce que tout esprit fini ne saurait clairement comprendre : mais