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que la perception qu’ils en ont n’est pas sensible. Mais les philosophes savent bien qu’il y a autant de matière dans un pied cube d’air, que dans un pied cube de plomb. Il semble au contraire que les idées doivent nous toucher avec d’autant moins de force qu’elles sont plus grandes. Et si le ciel nous paraît si petit en comparaison de ce qu’il est, c’est peut-être que la capacité que nous avons d’apercevoir est trop petite pour avoir une perception vive et sensible de toute sa grandeur. Car il est certain que plus nos perceptions sont vives, plus elles partagent notre esprit, et remplissent davantage la capacité que nous avons d’apercevoir ou de penser : capacité qui certainement a des bornes fort étroites. L’idée de l’infini en étendue, renferme donc plus de réalité que celle des cieux ; et l’idée de l’infini en tous genres d’êtres, celle qui répond à ce mot l’Être, l’Être infiniment parfait en contient encore infiniment davantage, quoique la perception dont cette idée nous touche soit la plus légère de toutes ; d’autant plus légère qu’elle est plus vaste, et