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vement se peut communiquer par impulsion, et l’expérience prouve, sans aucune obscurité, qu’effectivement il se communique par cette voie. Mais il n’y a aucune raison ni aucune expérience qui démontre clairement le mouvement d’attraction ; car dans les expériences qui semblent les plus propres à prouver cette espèce de mouvement, on reconnaît visiblement, lorsqu’on en découvre la cause véritable et certaine, que ce qui paraissait se faite par attraction ne se fait que par impulsion. Ainsi, il ne faut point s’arrêter à d’autre communication de mouvement qu’à celle qui se fait par impulsion, puisque cette manière est certaine et incontestable, et qu’il y a du moins quelque obscurité dans les autres qu’on pourrait imaginer. Mais, quand on pourrait même démontrer qu’il y a dans les choses purement corporelles d’autres principes de mouvement que la rencontre des corps, on ne pourrait raisonnablement rejeter celui-ci ; l’on doit même s’y arrêter préférablement à tout autre, puisqu’il est le plus clair et le plus évident, et qu’il paraît si incontestable, qu’on ne craint point d’assurer qu’il a été reçu de tous les peuples et dans tous les temps.

L’expérience fait connaître qu’un aimant qui nage librement sur I’eau s’approche de celui qu’on tient en sa main lorsqu’on lui présente un certain côté ; il faut donc conclure qu’il est poussé vers lui. Mais, comme ce n’est pas l’aimant que l’on tient qui pousse celui qui nage, puisque celui qui nage s’approche de celui que l’on tient, et que cependant celui qui nage ne se remuerait point si l’on ne lui présentait celui que l’on tient, il est évident qu’il faut recourir au moins à deux moyens pour expliquer cette question, si l’on veut la résoudre par le principe reçu de la communication des mouvements.

L’aimant c s’approche de l’aimant C ; donc l’air, ou la matière fluide et invisible qui l’environne, le pousse, puisqu’il n’y a point d’autre corps qui le puisse pousser, et c’est là le premier moyen.