trois primitives, et qu’elles sont d’autant plus composées que l’idée principale du bien ou du mal qui les excite est accompagnée d’un plus grand nombre d’idées accessoires, ou que le bien et le mal sont plus circonstanciés par rapport à nous.
Si l’on se souvient de ce que l’on a dit de la liaison des idées, et que dans les grandes passions les esprits animaux étant extrêmement agités réveillent dans le cerveau toutes les traces qui ont quelque rapport avec l’objet qui nous agite, on reconnaîtra qu’il y a des passions différentes d’une infinité de façons, lesquelles n’ont point de nom particulier, et qu’on ne peut expliquer d’autre manière qu’en disant qu’elles sont inexplicables.
Si les passions primitives, de la combinaison desquelles les autres l’engendrent, n’étaient point capables du plus ou du moins, on n’aurait pas de peine ã déterminer le nombre de toutes les passions. Mais le nombre des passions qui se font de l’assemblage des autres est nécessairement infini, parce qu’une même passion ayant des degrés infinis, elle peut, en se joignant avec les autres, se combiner en une infinité de manières ; de sorte qu’il n’y a peut-être jamais eu deux hommes émus d’une même passion, si par même passion l’on entend l’assemblage de tous les mouvements égaux et de tous les sentiments semblables qui se réveillent en nous à l’occasion de quelque objet.
Mais le plus et le moins ne changeant point l’espèce, on peut dire que le nombre des passions n’est pas infini, parce que les circonstances qui accompagnent le bien et le mal ne sont point infinies. Mais expliquons nos passions en particulier.
Lorsque nous voyons quelque chose pour la première fois, ou que l’ayant déjà vue plusieurs fois accompagnée de certaines circonstances, nous la voyons revêtue de quelques autres, nous en sommes surpris et nous l’admirons. Ainsi, une nouvelle idée ou une nouvelle liaison de vieilles idées cause en nous une passion imparfaite, qui est la première de toutes, et que l’on nomme admiration. Je dis que cette passion est imparfaite, parce qu’elle n’est point excitée par l’idée ni par le sentiment du bien.
Le cerveau se trouvant alors frappé en de certains endroits dans lesquels il ne l’avait jamais été, ou d’une manière toute nouvelle. l’âme en est sensiblement touchée, et par conséquent elle s’applique fortement à ce qu’il y a de nouveau dans son objet ; par la même raison qu’un simple chatouillement à la plante des pieds excite dans l’âme, par la nouveauté plutôt que par la force de l’impression, un sentiment très-sensible et très-applicant. Il y a encore d’autres raisons de l’application de l’âme aux choses nou-