sont les plus nécessaires de toutes pour les sciences spéculatives et pour la morale, et que l’on peut regarder comme le fondement de toutes les sciences humaines.
IV. Voici la première qui regarde les sciences : On ne doit jamais donner de consentement entier qu’aux propositions qui paraissent si évidemment vraies, qu’on ne puisse le leur refuser sans sentir une peine intérieure et des reproches secrets de la raison ; c’est-à-dire sans que l’on connaisse clairement qu’on ferait mauvais usage de sa liberté, si l’on ne voulait pas consentir, ou si l’on voulait étendre son pouvoir sur des choses sur lesquelles elle n’en a plus.
La seconde pour la morale est telle : On ne doit jamais aimer absolument un bien si l’on peut sans remords ne le point aimer. D’où il s’ensuit qu’on ne doit rien aimer que Dieu absolument et sans rapport, car il n’y a que lui seul qu’on ne puisse s’abstenir d’aimer de cette sorte sans remords ; c’est-a-dire sans qu’on sache évidemment qu’on fait mal, supposé qu’on le connaisse par la raison ou par la foi.
V. Mais il faut remarquer ici que quand les choses que nous apercevons nous paraissent fort vraisemblables, nous nous trouvons extrêmement portés à les croire ; nous sentons même de la peine quand nous ne nous en laissons pas persuader ; de sorte que si nous n’y prenons bien garde, nous sommes fort en danger d’y consentir, et par conséquent de nous tromper ; car c’est un grand hasard que la vérité se trouve entièrement conforme à la vraisemblance. Et c’est pour cela que j’ai mis expressément dans ces deux règles, qu’il ne faut consentir à rien jusqu’à ce que l’on voie évidemment qu’on ferait mauvais usage de sa liberté, si l’on ne consentait pas.
Or quoi que l’on se sente extrêmement porté à consentir a la vraisemblance, si toute lois on prend le soin de faire réflexion si l’on voit évidemment qu’on est obligé d’y consentir, on trouvera sans doute que non. Car si la vraisemblance est appuyée sur les impressions de nos sens, vraisemblance néanmoins qui n’en mérite pas le nom, alors on se trouvera fort incliné à s’y rendre ; mais on n’en reconnaîtra point d’autre cause que quelque passion, ou l’affection générale que l’on a pour ce qui touche les sens, comme on le verra assez dans la suite.
Mais si la vraisemblance vient de quelque conformité avec la vérité, comme d’ordinaire les connaissances vraisemblables sont vraies, prises dans un certain sens, alors si on fait réflexion sur soi-même, l’on se sentira porté à faire deux choses ; l’une à croire, et l’autre à examiner encore ; mais on ne se trouvera jamais si