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À force de croisements, le type primitif s’était effacé ; les mœurs, l’esprit, la langue, tout s’était modifié.

Aux débuts de la société romaine, Lucrèce violée se tuait, Virginius tuait sa fille pour lui épargner la flétrissure ; c’était dans l’ordre. Cinq siècles plus tard, l’impératrice Messaline courait les lupanars, Agrippine était la maîtresse de son fils Néron. Les femmes épousaient publiquement des femmes et les hommes des hommes : la race des gitons pullulait.

La majesté romaine avait disparu. Qu’il était loin ce temps où Cinéas voyait dans Rome un temple et dans le Sénat une assemblée de dieux ! Le citoyen, jadis si fier de son titre, ne réclamait plus que du pain et des jeux. Le Sénat, ballotté entre la plèbe, les légions et la garde prétorienne, se prosternait dans un avilissement grotesque devant chaque César. Les noms de saint, sacré, éternel, divinité, étaient prodigués à tout maître ; on adorait son effigie, ses expéditions et tout ce qui se rapportait à sa personne. Lorsque Dioclétien, effrayé du poids de l’empire, se fut donné un collègue Auguste et, au-dessous, deux Césars, on prit l’habitude de parler à un seul comme représentant également les trois autres et l’ancien tutoiement se perdit. De là, s’introduisit dans les langues modernes cette absurdité de parler au pluriel à une seule personne.

Les applaudissements adulateurs du Forum et du Cirque passèrent dans le Sénat ; à partir de Trajan, avènements d’empereurs, lois, décrets furent accueillis par des acclamations rythmées et multipliées. Lorsque les légions eurent nommé Claude II à l’empire du monde, les pères conscrits, réunis