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bientôt plus misérable que jamais, le servage politique s’ajoutant à l’oppression économique. Mais l’humanité ne peut abdiquer ses destinées ; malgré les chocs en retour qu’elle subit de temps à autre, elle ne reprendra pas la route du passé. Contre la logique du progrès, le cléricalisme et le césarisme, quels que soient leur masque, ne prévaudront pas.

En dépit des manœuvres savantes des partis conservateurs, en dépit des efforts de l’État pour satisfaire les intérêts les plus opposés, en dépit du libéralisme bourgeois et de la philanthropie officielle, un effondrement social est inévitable à bref délai. Tout y concourt : tandis que les progrès croissants du machinisme jettent sur le pavé des foules acculées à ce dilemme : se révolter ou mourir, la concentration des capitaux, éliminant la classe intermédiaire qui sert de tampon, précipite la collision inévitable entre la poignée de possesseurs et la masse déshéritée. D’un autre côté, l’accumulation des emprunts pousse tous les États vers le gouffre béant de la banqueroute. Déficit, chômage, grève, misère, révolte, tout se tient, et il est probable que les gouvernants, gardiens du vieil ordre social, épouvantés de l’avenir, chercheront leur salut dans la guerre. La guerre ! ces deux mots terribles retentiront avant peu d’un bout à l’autre de l’Europe frissonnante, car, quelle que soit celle qui débute, guerre internationale ou guerre civile, l’une entraînera fatalement l’autre. Au nord, au sud, à l’est, à l’ouest, des avalanches humaines rouleront vers les frontières, l’outillage perfectionné des Krupp, des Uchatius, des Bange, des Veterli, des Mauser,