gouar, les autochtones disparaissent. L’Irlandais, l’Allemand, le Français, l’Italien, le Suisse viennent se fondre parmi les indigènes de race blanche : c’est le prolétariat qui, avec la civilisation, envahit ces contrées. La vieille Europe rejette son trop plein de misérables ; ceux-ci, en quête de pain et de foyer, promènent du Canada aux Pampas leurs haillons et leurs idées, leurs rancunes, leurs haines, leurs espérances. C’est bientôt par millions que le continent américain nombrera les révolutionnaires. Chicago, la cité des machines géantes, Chicago tant de fois brûlée et toujours renaissante, est devenue un des foyers de l’idée anarchiste : le peuple de ses usines se murmure les noms de ces hommes : Spies, Parsons, Engels, Fischer, Lingg, morts en martyrs pour l’affranchissement des déshérités. New-York, Saint-Louis, Boston, Philadelphie, Milwauhee voient se former des noyaux socialistes de toutes nuances et, sous la pression des circonstances, c’est certainement la fraction la plus avancée qui prendra la tête du mouvement. C’est en vain que l’association des Knights of labour (chevaliers du travail), qui embrasse les États-Unis et que manie le grand-maître Powderly, s’efforce de réaliser un accord entre le capital et le salariat ; c’est en vain que les disciples de Henry George, jadis fougueux, aujourd’hui modérés, affirment qu’un simple vote législatif, nationalisant le sol, dénouera la crise économique ; plus on va, plus les antagonismes sociaux s’accentuent. Tandis que Jay Gould règne avec quatorze cents millions, Mackay avec treize cents, Vanderbilt avec six cent cinquante, les grèves violentes se multi-