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fait aux principes de l’anarchie, parce que ces principes font la base de la conspiration : l’anarchie doit être condamnée. »

Elle le fut, en effet. Après une admirable défense où ils se montrèrent successivement profonds, enthousiastes, simples, énergiques, ils furent frappés sans pitié : quinze ans de prison pour Neebe, la mort pour les autres : plus tard, Schwab et Fielden furent commués aux travaux forcés à perpétuité.

Ici se place un incident idyllique faisant rêver d’une rose entr’ouverte sur un cercueil. Une jeune fille au nom gracieux de Nina, belle, cela va sans dire, et appartenant à la notable famille Van Zandt, s’était prise d’enthousiasme pour Spies, courbant ses juges sous sa parole de martyr. Intrépidement, elle le fit demander en mariage ; les geôliers, atterrés de cette énormité, qui témoignait combien la cause des condamnés avait éveillé de sympathies jusque dans les classes dirigeantes, refusèrent de procéder à la cérémonie. Spies, qu’attendait la mort, cette autre fiancée jalouse, dut envoyer procuration à son frère pour contracter le mariage.

Quinze mois d’agonie s’écoulèrent entre le procès et l’exécution. La ville entière, travaillée au début par des agents secrets, était redevenue favorable aux condamnés. Les demandes de grâce, les menaces aussi pleuvaient de tous les coins du monde : on ne pouvait croire que l’exécution eût lieu. Enfin, les anarchistes purent entendre de leurs cellules le marteau des charpentiers clouant leurs cercueils. Tout était dit ; mais Lingg, le plus bouillant d’entre eux, ne voulut pas donner à ses ennemis la joie de