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Du moins, il donna jusqu’à son dernier souffle. Combien devait-il souffrir cet homme austère aux gamineries de bourgeoisillons en goguette égarés dans cette révolution prolétarienne ! « Croyez-vous donc, disait-il amèrement à Pyat, cherchant à s’évader par une démission, que tout le monde approuve ce qui se fait ici ? Eh bien, il y a des membres qui sont restés et qui resteront jusqu’à la fin, malgré les insultes qu’on nous prodigue et, si nous ne triomphons pas, ils ne seront pas les derniers à se faire tuer soit aux remparts soit ailleurs. » Et quand, entrés dans Paris par la porte de Saint-Cloud abandonnée, les Versaillais vont étrangler la Commune, le jacobin Delescluze, au grand scandale des galonnés incapables, s’écrie dans une proclamation demeurée célèbre : « Plus d’états-majors ! plus de chefs ! place au peuple. » Puis, cet autoritaire, qui proclame ainsi l’anarchie, adresse à sa sœur une lettre touchante et va se faire tuer à la barricade du Château-d’Eau.

L’autre, Vermorel, publiciste de vingt-neuf ans, représentait l’élément socialiste et studieux. Poursuivi par une infâme accusation de mouchardage, en butte aux attaques du romantique Pyat, il chercha la mort comme Delescluze et, atteint en relevant un fédéré blessé, expira peu de jours après. Ces deux hommes, séparés par le caractère, réunis par la mort, représentaient les deux pôles de la Commune.

La veille, leur collègue Rigault avait été fusillé rue Gay-Lussac. Millière, que sa qualité de député rendait légalement inviolable et qui n’avait pris