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selait déjà depuis plusieurs jours dans les rues de Paris transformé en abattoir.

Le massacre fut effroyable. La lutte aux barricades avait été, en somme, peu meurtrière pour les fédérés bien abrités ; le rapport officiel prétend que les troupes régulières n’eurent pas plus de 63 officiers et 430 soldats tués ; si c’était vrai, il faudrait en inférer qu’à peine quelques centaines de communards furent tués en combattant. Or, un académicien des plus férocement réactionnaires, Maxime Ducamp, dans ses « Convulsions de Paris », avoue 6,667 cadavres de Parisiens, nombre qu’il convient au moins de tripler : « La République, dit-il, gouvernement pour ainsi dire anonyme et même, jusqu’à un certain point irresponsable, par le fait seul de son principe, qui est la collectivité, déploya dans la répression une énergie dont toute monarchie eût été incapable ». Femmes, enfants et vieillards fournirent un immense contingent au massacre qui se prolongea plusieurs jours après la bataille. Six cent cinquante-et-un enfants de moins de seize ans, disent les écrivains officiels, avaient été pris les armes à la main.

Deux des meilleurs parmi les membres de la Commune choisirent ce moment pour mourir. Charles Delescluze, sexagénaire, brisé par l’exil et le bagne, avait voué sa vie à la République. Quand éclata la Commune, il eut le grand cœur, malgré son vieux jacobinisme, de venir parmi ceux qui représentaient l’idée socialiste et décentralisatrice. Délégué à la guerre depuis le 9 mai, il n’avait pu ramener sous les plis du drapeau rouge une victoire impossible.