Dès lors, chaque jour renouvellera ces scènes tragiques : prisonniers fusillés, blessés torturés, ambulancières violées ; les soldats de Forbach, de Reischoffen, de Sedan et de Metz, revenus des prisons allemandes avec le besoin effréné de se venger de leurs défaites sur n’importe qui ; des troupeaux lamentables de fédérés défilant dans les rues de Versailles sous les injures, sous les coups d’une population hurlante faite de toutes les écumes : crevés bonapartistes, francs-fileurs du siège précédent, journalistes bien pensants fraternisant avec la police, prostituées de toutes marques, paillasses à soldats ou maîtresses d’officiers, fouillant les blessures du bout de leur ombrelle, chiennes en rut de sang, excitant les bourreaux de leurs glapissements aigres.
La Commune s’était montrée bénigne jusqu’à la faiblesse : elle avait, à la vérité, rendu un décret sur les otages, mais avec l’intention de ne pas l’appliquer, mesure purement comminatoire. La plupart des exécutions imputées aux fédérés furent l’œuvre de la spontanéité populaire : le matin même du 18 mars, les généraux Clément Thomas, arrêté par des prolétaires qui s’étaient rappelés Juin, et Lecomte, empoigné par ses soldats eux-mêmes indignés de s’entendre commander feu sur la foule, avaient été fusillés. Ce fut tout jusqu’au milieu de la semaine sanglante : lorsque des prisonniers, espions comme Veysset, journalistes réacteurs comme Chaudey, escrocs de finance comme Jecker, magistrats de l’empire comme Bonjean, gendarmes, gardiens de la paix, prêtres, en tout moins de cent personnes, furent passés par les armes, le sang ruis-