sur un pied purement révolutionnaire, l’Internationale est morte en tant qu’organisation, mais son esprit plane sur toute cette fin de siècle, appelant les déshérités à la bataille. De ses cendres éparpillées au vent, sont nés dans le monde entier des groupes de travailleurs marchant sous le fanion de leur choix à la révolution sociale. Parmi ces groupes, les uns gardent une autonomie jalouse, les autres s’agrègent sous des formes autoritaires ; malgré l’action dissolvante des personnalités, les hésitations, les défections, les imprudences, collectivistes, indépendants, anarchistes, tout en s’entre-combattant, comme ces sectes chrétiennes des premiers siècles qui revendiquaient pour elles seules l’orthodoxie, n’en sapent pas moins la société actuelle. Disséminés, ils portent en tous lieux le nouveau verbe et attaquent l’ennemi de toutes parts, en lui donnant le moins de prise possible. Cette absence même d’une direction suprême, qui ne servirait qu’à éveiller les ambitions, fait leur force : on pouvait abattre la tête unique de l’Internationale, on ne peut rompre le réseau des groupes révolutionnaires qui enveloppe aujourd’hui le monde civilisé. D’où la supériorité marquée des partisans de l’initiative individuelle sur les enrégimentés qui s’imaginent vaincre, par une forte organisation, l’organisation incomparablement plus forte de l’État ayant sous la main tous les rouages sociaux.