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d’assurer le pain quotidien plutôt que par les enthousiasmes de la liberté.

Ce socialisme-là, à son heure, fut très utile. Parlant au nom de la science, il proscrivit impitoyablement toutes les rêveries des sentimentalistes. Et lorsque Proudhon, qui avait si bien bataillé contre les mystagogues, en vint à reconstituer cette propriété individuelle qu’il avait niée et à proclamer l’efficacité du système coopératif, Marx eut raison d’affirmer que là n’était pas la solution de la question propriétaire, deux formes restant seules possibles : la possession individuelle ou la possession collective, et tout moyen terme devant nécessairement ramener à l’une ou conduire à l’autre. Mais les socialistes libertaires envisageaient avec terreur le despotisme d’un gouvernement maître politique et économique : le mutuellisme ne résolvant rien, le communisme marxiste leur semblant trop lourd, ils durent chercher une solution nouvelle : c’était préparer les voies au communisme-anarchiste.

La lutte menée par Marx contre les proudhoniens, Lassalle la menait en Allemagne, contre les partisans de Schultze-Delitsch qui prônaient, eux aussi, la coopération et le crédit. Théoricien, mais de plus tribun et vulgarisateur émérite, il provoque une agitation grave au sein des foules ouvrières ; celles-ci commencent à entrevoir que les bourgeois, même progressistes, ne peuvent rien pour elles. Et, tout en concluant à la conquête pacifique du suffrage universel qui, croit-il, permettra au peuple, maître de l’État, de transformer la société, ce légalitaire est amené à formuler des théories impliquant les con-