irresponsable, c’est la marche logique du système. La classe possédante, luttant sans cesse, luttant contre elle-même, devient de plus en plus riche et de moins en moins nombreuse ; vaincus par leurs concurrents mieux armés, c’est-à-dire plus fortunés, les demi-riches de la veille, boutiquiers, petits propriétaires, industriels de second ordre, tombent, le désespoir au cœur, le blasphème aux lèvres, dans ce prolétariat qu’eux-mêmes, naguère, méprisaient et exploitaient, et, miracle des situations ! ces ci-devant bourgeois, habitués plus que l’ouvrier au bien-être et à l’indépendance, deviennent, de conservateurs forcenés, les plus violents des révolutionnaires.
Fourier entrevoyait cela ; trop profond analyste pour se laisser éblouir par le clinquant des légendes, il reconnaissait combien avait été nulle la révolution au point de vue économique. Il ne voulut, cependant, pas se rendre compte de l’immense progrès intellectuel qu’elle avait fait faire aux masses et de l’influence que, même vaincue, elle devait exercer sur le siècle suivant. Humanitaire avant tout, il restait saisi d’horreur devant le tableau des exécutions capitales, des noyades et des champs de bataille ; ces visions sanglantes l’épouvantaient et, maudissant l’épopée républicaine, il se réfugiait tout ému dans son rêve d’harmonie.
L’harmonie ! c’est le grand mot et, mieux que le mot, l’idée du système de Fourier : une idée qui rachète bien des divagations qu’on est stupéfait de trouver mêlées aux conceptions les plus puissantes. « Harmonie universelle, déclare-t-il, but intérieur et foyer commun de l’ensemble des passions. » Car