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souciaient les idéologues qui répondaient par des déclarations de principes à la clameur des déshérités demandant du pain ! « Âmes de boue qui n’estimez que l’or, je ne veux point toucher à vos trésors, quelque impure qu’en soit la source ! » déclamait imbécilement Robespierre défendant la propriété, et il ajoutait : « Il s’agit bien plus de rendre la pauvreté honorable que de proscrire l’opulence. » Et tous les puritains du jour, jouisseurs du lendemain, d’applaudir l’incorruptible.

Il y eut, cependant, parmi ces bourgeois quelques hommes de cœur, mais, en général, leur amour des mots les empêcha de voir clair dans les faits : brisant les liens corporatifs, bien lourds à la vérité, ils isolaient le travailleur des villes, livré désormais à la merci de l’exploiteur. Prescrivant le rachat des terres reprises aux seigneurs par les paysans, ils privaient de tout droit à la propriété rurale des millions de prolétaires qui n’avaient pu, comme les robins et les marchands, économiser de gros écus. Le servage économique allait succéder au servage féodal.

Dès le premier jour, les représentants de la bourgeoisie louvoyèrent entre le roi qu’ils voulaient abattre et le peuple qu’ils voulaient évincer. Ce peuple, animalisé par des siècles de servage et aveuglé soudain par la liberté, comme par une lumière trop vive, les épouvantait. Leur écrivain, Taine, l’a comparé à un éléphant pris de rage. Aussi, tous les efforts des nouveaux gouvernants tendirent-ils à maîtriser cette force énorme : pour y arriver, ils édifièrent une nouvelle autorité, celle de