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que ses bras pour vivre ! » Philosophes, jansénistes, libertins gravitent dans des sphères plus élevées, entre la noblesse qui les caresse comme des animaux rares, et la bourgeoisie qui les admire.

En face du Gesù qui fait rage et se multiplie, s’élabore une autre association non moins mystérieuse, non moins active, destinée à devenir sa grande rivale. Inspirée à la fois du vieux mysticisme et des nouvelles tendances humanitaires, la Franc-Maçonnerie pousse des racines en Allemagne, en Angleterre, en France, en Italie. D’association corporative qu’elle était au début, elle s’enfle démesurément au souffle des rabbins juifs et des docteurs protestants : elle va devenir une société politique, une arme de combat ; par elle, le cri de vengeance des Albigeois vaincus, des Anabaptistes massacrés, des penseurs livrés au bûcher, arrive aux générations nouvelles.

Cela est indéniable : la Franc-Maçonnerie, aujourd’hui figée dans ses rites caducs et condamnée à mourir parce qu’elle a usé ses forces dans son triomphe, eut son heure révolutionnaire. « Une association d’hommes marchant invariablement vers un certain but, a dit Joseph de Maistre, ne peut, s’il n’y a pas moyen de l’anéantir, être combattue et réprimée que par une association contraire. » Au xviiie siècle, la Maçonnerie croise le fer avec le Gesù et entame dans les ténèbres ce duel qui dure encore. Chose remarquable, ce fut un élève des Jésuites, Weishaupt d’Ingolstadt, qui porta à ses anciens maîtres les premières bottes.

À ces époques de noir absolutisme, on ne pouvait guère penser, — et encore avec quelles précautions ! —