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tissants, le sentiment profond d’égalité qui animait la masse des révolutionnaires n’en fut pas détruit. Ce fut le 24 juin 1535 que les assiégeants, guidés par un traître, escaladèrent les murailles : une fois de plus, le fer et la torche eurent raison des ennemis de l’ordre !

Le communisme mystique des anabaptistes devait succomber. Partant de la révélation divine qu’ils déclaraient permanente et non de la science naturelle qu’ils méconnaissaient, ils tombèrent, libres-penseurs au début, dans la foi irraisonnée. Leur triomphe, s’ils eussent vaincu, eût peut-être, pour des siècles, donné un nouvel aliment à la ferveur populaire et consolidé l’édifice religieux sur une base plus résistante que la papauté croulant de vétusté. Rien ne devient, à la longue, plus oppressif que ces religions ou ces philosophies entées sur un idéal absolu : le fanatisme et l’intolérance en découlent tout naturellement, de sorte que, parties d’un principe élevé, et après avoir fait sonner les mots de liberté et de dignité, elles finissent par tuer toute dignité, toute liberté en englobant dans un impitoyable anathème libres-penseurs et partisans du vieux culte.

Telle qu’elle fut, la guerre des anabaptistes n’en demeure pas moins le mouvement le plus profondément social jusqu’à la révolution française. Et si la réforme, désormais châtrée, réduite à une querelle théologique, peut prendre pied en Allemagne et en Suède, faire germer en Angleterre la révolution républicaine de 1648, ce fut uniquement grâce aux enragés, aux anarchistes de Frankenhausen et de Munster. Ceux-là atterrèrent l’ennemi dont tous les