Page:Malato - Les classes sociales au point de vue de l’évolution zoologique.djvu/97

Cette page a été validée par deux contributeurs.

des juges célestes, punissant le mal et vengeant la faiblesse opprimée. Idée bientôt exploitée par les oppresseurs eux-mêmes et par les prêtres devenus leurs complices, qui prêchaient la résignation aux victimes confiantes uniquement dans l’intervention — terrestre d’abord, puis posthume — d’un père divin. Ce dieu, créé par les hommes et à leur image, devait non pas empêcher le mal — ce en quoi il se fût montré tout puissant et juste — mais le punir. À leur tour, les chefs d’État, prêtres, législateurs et juges, se présentant aux foules, auréolés d’un reflet de la divinité au nom de laquelle ils parlaient se sont enivrés de l’idée de leur supériorité qu’ils affirmaient en écrasant leurs semblables.

Malgré l’abolition de la torture, abolition qui n’a eu lieu que nominalement dans certains pays d’Europe, la majorité des juges modernes ont conservé une mentalité de tortionnaires. Sans aller jusqu’en Russie et en Turquie, pays gouvernés par une autocratie féroce et imbécile qui ne relève pas de l’humanité, on a pu entendre en Espagne, pays constitutionnel où existe une opinion démocratique, un juge militaire, le colonel Enrique Marzo, déclarer lors du trop célèbre procès de Montjuich, que : « Il convient de fermer les yeux à la raison ». Paroles atroces qui rappellent celles du magistrat français Laubardemont : « Donnez-moi une ligne de l’écriture d’un homme, je me charge de le faire pendre » ou encore ce madrigal du galant président des Brosses, adressé à une belle dame qui se montrait cruelle : « J’ai fait mettre à la question des gens qui étaient moins coupables que vous ».