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recrutés dans l’armée, chaque jour plus nombreuse, des sans-travail, n’auraient pas besoin de long temps. Leur supériorité numérique sur la bourgeoisie est écrasante.

Mais à notre époque de prodigieux développement scientifique, la force du nombre est peu de chose. La bourgeoisie tient le prolétariat captif par mille chaînes, non seulement par l’armée et la police recrutées dans la masse populaire, mais par les préjugés et l’ignorance, ce qui est pire que tout. Qu’est-ce que l’instruction primaire concédée au peuple et bien vite oubliée dans l’abrutissement fatal de la vie d’atelier, à côté de l’instruction supérieure accessible à la seule bourgeoisie ? Les prolétaires, vis-à-vis de la classe dirigeante sont dans la situation de ces innombrables troupeaux d’Indiens qu’une poignée de conquistadores bien armés mettaient en déroute.

Le prolétaire a bien la conviction instinctive que « la société n’est pas juste », qu’elle est « mal organisée », mais son esprit, incapable d’une longue analyse, ne conçoit pas le remède efficace à ses maux. Il ne comprend pas, sauf une élite consciente, que le salariat, succédané du servage et de l’esclavage, est l’obstacle fatal à son émancipation ; accoutumé à la tutelle, il ne conçoit pas qu’il puisse se passer de patrons et leur substituer l’association formée par des travailleurs comme lui, entrés révolutionnairement en possession des moyens de production. Cette idée, si simple qu’elle soit, est encore trop compliquée, trop abstraite pour son cerveau. Ce qu’il se borne à réclamer, c’est l’aug-