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Aussi, les socialistes ont-ils beau former des partis se dénommant « ouvriers » ; par la force des choses, ce sont des bourgeois d’éducation et souvent de situation, sinon d’idées, qui se trouvent à la tête de ces partis. Leur instruction supérieure les désigne pour guides naturels aux hommes d’instruction primaire. Ceux-ci peuvent récriminer contre cette supériorité ; ils sont forcés de la subir tout en se défiant instinctivement, souvent avec raison, de ces hommes qu’ils sentent différents d’eux.

C’est que l’individu qui vient d’être précipité dans le servage et la misère après avoir connu l’indépendance et le bien-être ne se résigne pas aussi facilement que le déshérité de naissance. Celui-ci n’a pas connu une autre vie ; il ne croit pas à la possibilité de s’affranchir et se répète cette phrase transmise à travers les siècles par l’ignorance et la lâcheté : « Cela a toujours existé et existera toujours. »

Spartacus, qui fit trembler la société romaine et légua un exemple immortel aux opprimés de tous temps, n’était pas esclave de naissance : c’était un prisonnier de guerre. S’il eût fait souche, ses descendants à la troisième ou quatrième génération se fussent sans doute résignés à la servitude.

Enfermé chaque jour pendant dix ou onze heures à l’atelier, travaillant dans certaines professions jusqu’à quatorze et quinze heures, condamné à accomplir automatiquement une tâche monotone, ce qui est pis que pénible, l’ouvrier est transformé par le régime de la grande industrie non plus seulement en bête de somme