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d’alliance était conclu entre les deux hommes, rois par l’or dans la société républicaine.


XIV

LES BRISOTINS


Ce jour-là, Galfe et Céleste étaient allés se promener du côté de la gare. Ils étaient partis à l’aube pour jouir de l’éveil de la nature par une belle matinée de printemps. Un spectacle cher aux amoureux. Galfe et Céleste l’étaient toujours.

Dans le ciel, rose du lever du soleil, des chants d’oiseaux montaient au milieu d’un grand calme. Les habitants de Mersey n’étaient pas encore réveillés ou, s’ils l’étaient, les volets de leurs maisons demeuraient clos. Dans une heure commencerait le mouvement habituel, l’arrivée des voitures maraîchères, la descente des ouvriers dans la ville, les allées et venues autour des puits où les mineurs soumis travaillaient sous la protection de la troupe, tandis que les grévistes, se reposant de leurs fatigues d’antan, faisaient la grasse matinée avec leurs femmes. Le droit au repos est-il moins nécessaire que le droit au travail, jadis réclamé avec tant de conviction par des salariés dont la vie entière n’est qu’un incessant labeur ?

En descendant la côte des Mésanges, les deux amants aperçurent, rangés devant la gare, une multitude d’ouvriers. Non pas une troupe, mais un troupeau, un troupeau immobile, muet, plus ou moins aligné, les uns debout, quelques autres assis à terre, dans l’attente apparemment du berger et des chiens de garde qui devaient venir les chercher.

Galfe et Céleste eurent le même tressaillement ; ces hommes portaient tous le chapeau de cuir des mineurs. Chacun d’eux avait un lourd bissac passé en sautoir.